jeudi 15 décembre 2011

CORAL Réseau


Le Coral, installé au mas d’Aimargues, près de Montpellier,
tirait son nom d’un vague manège. Mais le rodéo commencera à Paris, dans le cabinet du juge d’instruction ...
LE VILAIN MANÈGE DU CORAL.

Par Vincent ACKER.
LE mercredi 13 octobre 1982, une escouade de gendarmes prend position autour d’une vieille ferme d’Aimargues, dans le Gard, à quinze kilomètres de Nîmes. Rapidement l’ordre d’assaut est donné et les forces de l’ordre s’élancent. Après avoir fouillé consciencieusement chacune des pièces de la maison principale ainsi que les bâtiments annexes, les gendarmes retournent sur Montpellier, emmenant avec eux trois personnes qui seront interrogées par des policiers de la brigade des stupéfiants et du proxénétisme. Ils ont effectué le déplacement tout exprès... L’identité des trois personnes interpellées sera donnée un peu plus tard : il s’agit de Claude Sigala, trente-neuf ans, directeur de centre, d’Alain Chiapello, trente-cinq ans, médecin psychiatre et de Jean-Noël Bardy, vingt-six ans, éducateur.
Cette affaire ne tardera pas à avoir un nom : Coral ! Un nom qui lui va à merveille car ce scandale pluridirectionnel va bientôt se muer en règlement de comptes.
Et l’on verra s’y mêler, dans un grouillement répugnant, pédophilie, homosexualité, corruption de fonctionnaire, chantage auprès de ministres bien en cour, tentative de déstabilisation et pressions politiques en tout genre...
Avec, pour parachever le tout, l’intervention de policiers verreux qui vont, sur ordre, tenter de compromettre — on dit moins élégamment : de mouiller — plusieurs journaux d’opposition. Au cours de l’enquête, on va s’apercevoir en effet,
Claude Sigala au Coral, en juillet 1981. Ses amis viennent d’arriver au pouvoir et il attend — avec confiance — une reconnaissance officielle.
et ce n’est pas le moindre des paradoxes, que la pédophilie et l’homosexualité, qui motivèrent initialement les recherches, cèdent la place, sous les projecteurs, à la production d’un faux grossier qui servira de mobile pour saisir un confrère et ruiner de réputation un ministre.
Mais, pour bien comprendre tous les épisodes plus ou moins tortueux de ce scandale, il convient de procéder avec la minutie d’un horloger franc-comtois.
Des sympathies à gauche

Le mercredi 13 octobre, donc, les policiers investissent et passent au peigne fin le centre Coral dirigé par Claude Sigala.
Créé en 1976 grâce à un don de la Fondation de France et à un prêt consenti par le Crédit Agricole, le centre Coral a pour but l’accueil et la protection de jeunes handicapés. Il se veut un endroit privilégié pour enfants autistes et débiles plus ou moins fortement atteints, où tous les troubles du comportement y seraient soignés, de la psychose profonde à la toxicomanie juvénile en passant par la délinquance primaire, considérée comme une « maladie ».
A l’origine de ce genre d’établissements, les « lieux de vie », un homme, Claude Sigala. Une quarantaine d’années, le visage rond sur fond de cheveux bouclés, un rien négligé et portant par prédilection le pantalon de velours côtelé sans âge et sans forme, le « docteur » Sigala est l’animateur du Coral et des autres centres qui ont vu le jour sous son impulsion.
Le programme de Sigala et de ses amis : faire sortir les handicapés du cadre « institutionnel » — hôpital ou maison spécialisée — en établissant des « rapports privilégiés entre éducateurs et malades ».
Il s’agit en vérité d’un des nombreux avatars du courant antipsychiatrique né dans les années soixante et « récupéré » en mai 68. Aux murs de l’asile, on opposera les bras accueillants du thérapeute aux traitements agressifs, la parole compréhensive aux règles d’autorité traumatisante, l’épanouissement par l ‘improvisation .
Il convient de noter que si les principes qui inspirent ce genre d’endroit sont généreux, ils peuvent aussi couvrir de nombreux abus. De fait, les centres attirent rapidement tout ce que la féconde famille des « psy » compte de ratés à la compétence douteuse, de marginaux qui y trouvent le gîte et le couvert... et bientôt, comme on l’apprendra, d’amateurs de chair fraîche aux arrière-pensées rien moins qu’éducatives...
En infiltrant le milieu des thérapeutes, en « théorisant » à qui mieux mieux, ces derniers se sont érigés bientôt en école de pensée. Et, comme il se doit, se sont dotés de moyens d’expression et de communication : la revue « Possible » entre autres, qui fait l’apologie des amours pédérastiques, et tout le circuit du CRA (Collectif des réseaux alternatifs).
L’arrivée au pouvoir en mai 1981 de François Mitterrand et des socialistes donne à Sigala et à ses émules des idées de grandeur. En effet, certaines de ses relations occupent maintenant des postes importants dans certains ministères. Jean-Pierre Rosenczveig, par exemple, appartient au cabinet de Georgina Dufoix, secrétaire d’Etat à la famille.
Grâce à certaines interventions, un groupe de travail est mis sur pied après l’élection présidentielle pour proposer aux DDASS (Directions départementales des affaires sanitaires et sociales) une intégration — autrement dit, une reconnaissance officielle — des quarante centres du type Coral.
Au moment où l’on arrête Claude Sigala, le dossier d’intégration se trouve sur le bureau même de Georgina Dufoix : l’accord, on le voit, n’aurait pas tardé à intervenir.
Mais alors, que viennent chercher les policiers parisiens dans cette ferme provençale, et qui les envoie ?
On le saura très vite, niais pas grâce aux policiers qui gardent un mutisme troublant. En fait les forces de l’ordre interviennent dans le cadre d’une commission rogatoire délivrée par le juge Michel Salzmann, magistrat instructeur à Paris, sur plaintes de parents d’enfants vivant au Coral et sur la foi d’une dénonciation détaillée. Motif : « attentats à la pudeur sans violence sur mineurs de moins de quinze ans et excitation de mineurs à la débauche ». En investissant le Coral les policiers espèrent donc trouver des preuves, des photos, des documents, obtenir des témoignages.
Le juge Salzmann, qui dirige officiellement l’enquête, est une figure. Ce jeune magistrat, d’une pugnacité sympathique n’est pas dénué d’ambition. Or, il sent dès le début que son dossier est explosif et risque, s’il ne fait pas long feu, de faire parler de lui. Homme d’action plus que de réflexion il va mener son enquête tambour battant, ne reculant devant aucun moyen ni aucune pression. Sa conduite personnelle, on le verra plus tard, n’est pas innocente ni exempte d’irrégularités. Un casse-cou le juge Salzmann ? Plutôt deux fois qu’une.
L’enquête policière se déroule dans une atmosphère de secret très inhabituelle, même pour une affaire de moeurs. Impossible en effet à la presse, dans ces premiers jours, de connaître le mobile réel de ces arrestations. Mais le fait est que, très rapidement, cette sordide affaire quitte son cadre provençal pour rejoindre la capitale, puisque dès le 16 octobre Michel Salzmann demande que les trois prévenus soient déférés dans son cabinet parisien. Il désire les entendre personnellement.
Le 18 octobre, c’est chose faite ! Mais les informations sont toujours tenues sous le boisseau. Ce que l’on sait, c’est qu’avant d’entrer dans le cabinet du magistrat, Claude Sigala hurle son innocence, se prétend l’objet d’une machination. Mais le juge a déjà pris sa décision et, sur la base des éléments d’enquête recueillis à Aimargues par les policiers de la brigade de répression des stupéfiants et du proxénétisme aux ordres du commissaire Riou, il inculpe les trois éducateurs et décide leur incarcération immédiate.
Sur place, les enquêteurs auraient découvert un fait nouveau, et d’une gravité exceptionnelle : Claude Sigala a en effet accepté le retour dans son centre d’un ancien stagiaire, auteur d’un meurtre en 1977, après sodomisation, d’un pensionnaire alors âgé de onze ans. Le criminel n’avait pas été jugé, les experts psychiatriques ayant établi son irresponsabilité mentale. Jean-Pierre Lannez, âgé de 17 ans à l’époque des faits, avait été interné dans un établissement psychiatrique. Or, il était revenu au Coral dans les semaines qui précédaient le déclenchement de l’affaire et certains enfants se seraient plaints de son comportement.
Autre coïncidence, sa disparition... juste avant les premières arrestations.
Les marginaux se mobilisent.

L’arrestation de Claude Sigala et des deux autres inculpés connaît un début de célébrité. Tous ses amis décident en effet de « monter » à Paris dans la semaine qui suit afin d’exiger sa mise en liberté. On commence des grèves de la faim, des comités de soutien se constituent à Montpellier, à Lyon, à Paris, ainsi que dans des capitales étrangères.
Le ban et l’arrière-ban des marginaux se mobilise. Ils vont même, un moment, s’attirer la sympathie active d’un psychiatre de renommée internationale, grand signeur de pétitions devant l’Eternel, Félix Guatarri. Comment ne serait-on pas indigné par ce nouveau coup de la « répression » : certains parents d’enfants confiés au centre ne viennent-ils pas plaider en faveur des inculpés ?
Pourtant, chez le juge d’instruction, Jean-Noël Bardy reconnaît s’être livré lui-même à des attouchements envers des pensionnaires du Coral tout en précisant que ces pratiques faisaient partie de la thérapie utilisée dans les « lieux de vie ».
Et puis, le 19 octobre, nouveau coup de théâtre. Le juge Salzmann prononce trois nouvelles inculpations. Conformément aux réquisitions du parquet, Gérard Durand, musicien, trente-sept ans, professeur de flûte à bec, est inculpé d’attentat à la pudeur et d’excitation de mineurs à la débauche par le juge Salzmann. Il est écroué immédiatement. Quant aux deux autres inculpés, il s’agit de Willy Marceau, vingt et un ans sans profession, et de René Schérer, professeur d’université à Paris-VIII.
Dans le Gard, non loin du Coral, les enquêteurs sont toujours à la recherche de Jean-Pierre Lannez. Il aurait été vu dans la région mais les policiers ont perdu sa trace.
Pendant ce temps, à Paris, une nouvelle inculpation a été prononcée, celle de Jean-Claude Krief. Nous reviendrons sur ce personnage ambigu : c’est par lui que le scandale arrive.
Or, le 19 octobre, Jean-Claude Krief est arrêté à son domicile et écroué, et le juge Salzmann n’y est pour rien. Le responsable de ses malheurs présents, sinon à venir, est le juge Etienne Guilbaud qui l’inculpe de « violation des dispositions du contrôle judiciaire ». Ce contrôle judiciaire lui avait été signifié en juillet 1982 après une affaire d’escroquerie et de falsification de chèques.
Jusqu’ici, en dépit du silence obstiné de la police et de la justice, le dossier du Coral se présente comme une banale affaire de moeurs. De ballets bleus aurait-on dit autrefois. Avec l’entrée en scène de Krief — entrée apparemment sans rapport avec l’intrigue — ce n’est plus un Feydeau graveleux qui est à l’affiche, mais Ionesco. Et ce n’est pas l’inculpation, le lendemain 20 octobre, du frère de Jean-Claude Krief pour tentative de chantage à l’égard d’un membre du gouvernement qui semble pouvoir éclaircir ce superbe imbroglio.
Et pourtant...
Au soir du 21 octobre la situation est la suivante : le juge Michel Salzmann a inculpé six personnes pour attentats à la pudeur sans violence sur mineurs de moins de quinze ans et une personne pour « tentative de chantage ». Pendant ce temps, un autre juge d’instruction inculpe le témoin numéro un de cette affaire pour violation du contrôle judiciaire.
Le 22 octobre, le magistrat instruisant l’affaire du Coral fait sortir Jean-Claude Krief de la prison de la Santé, où il est incarcéré depuis deux jours. Pendant plus d’une heure et demie que dure l’entretien, le jeune homme réitère ses accusations.
Le 26 octobre, Mr Jean-Jacques de Felice, Alain Ottan, François Roux et Michel Tubiana font la déclaration suivante au nom de leurs clients inculpés, qui exigent qu’une mesure identique soit prise à l’encontre de leur dénonciateur : « Nous demandons notre mise en liberté provisoire ainsi qu’une confrontation entre Krief et nous, et, compte tenu des déclarations de ce dernier qui se révèlent pour certaines mensongères, qu’il soit inculpé. La défense tient à réaffirmer qu’en l’état du dossier et contrairement aux allégations mensongères et diffamatoires de certains, dont elle ne manquera pas par ailleurs de tirer les conséquences, aucune photo pornographique ne figure dans la procédure à notre charge. »
Le même jour, le juge Salzmann entend une deuxième fois Claude Sigala qui proteste toujours de son innocence. L’entretien dure plus de trois heures. Celui du docteur Chiapello, lui aussi inculpé pour les mêmes motifs, ne durera lui qu’une heure... dans une ambiance beaucoup plus calme.
Le Tout-Paris chez le juge

Le 29 octobre 1982, nouveau coup de théâtre. Jean-Claude Krief entend se rétracter et évoque une machination politique. Me Vergès, son avocat, prétend que le dénonciateur aurait subi des pressions afin de discréditer certains membres du gouvernement.
Le même jour, le docteur Alain Chiapello, arrêté le 13 octobre en même temps que Claude Sigala et Jean-Noël Bardy, est relâché. Le juge a accepté cette mise en liberté mais a refusé celle des deux autres inculpés.
La presse peut désormais reprendre certaines informations selon lesquelles le Coral était un lieu de pédophilie notoire. Des témoignages affluent et semblent conforter la thèse du juge Salzmann.
Dans la confusion des rumeurs, les bruits les plus insensés se mettent à courir les salles de rédaction. La cohorte des exhibitionnistes de tout poil encombre les centraux téléphoniques. Notre confrère « Témoignage Chrétien » livre à ses lecteurs des récits d’enfants qui auraient été malmenés. La femme du directeur du Coral intervient auprès du journal pour l’inciter à la prudence.
Le 5 novembre 1982, les avocats de Sigala et de Bardy déposent une nouvelle demande de mise en liberté en faveur de leurs clients. Cette demande comme l’autre sera rejetée cinq jours plus tard par le juge Salzmann.
Quarante-huit heures ne sont pas écoulées que surviennent de nouvelles inculpations. Cette fois c’est le tour de Roger Auffran, directeur de la revue « Possible », ainsi que de Philippe Robert, un ancien pensionnaire du Coral. Mêmes motifs que pour les premiers inculpés : « attentats à la pudeur sans violence sur mineurs de moins de quinze ans et incitation de mineurs à la débauche ». C’est chez Auffran que les enquêteurs ont retrouvé des lots impressionnants de clichés pornographiques. Quant aux liens entre ce dernier et Claude Sigala ils existent depuis très longtemps. En effet, « Possible » assure la diffusion de certains articles du CRA (Collectif des réseaux alternatifs) qui regroupe les différents « lieux de vie » dont Claude Sigala est le président.
Le 18 novembre : confrontation entre les deux protagonistes de cette affaire, Jean-Claude Krief, d’un côté, et Claude Sigala de l’autre. Le juge Salzmann prétend que la rétractation de Krief ne modifie en rien son dossier puisque ce dernier ne repose pas sur ses déclarations mais sur d’autres éléments obtenus au cours de l’enquête. Le même jour les avocats de la défense demandent que le juge soit dessaisi du dossier au chef d’irrégularité. En effet, Michel Salzmann aurait donné son accord pour que Krief se rende aux Pays-Bas avec un policier de la BSP afin de retrouver des photos pornographiques qui auraient été prises au Coral. Or, en acceptant cette démarche le juge aurait violé, lui aussi, le contrôle judiciaire dont Krief était l’objet.
C’était à ce moment-là que Krief va être inculpé pour l’affaire du Coral proprement dite. Il est en effet accusé d’avoir volé un formulaire de procès-verbal dans les locaux de la police et d’avoir fabriqué un faux procès-verbal afin de le revendre.
Le 22 novembre, le juge Salzmann procède à l’audition de diverses personnalités du Tout-Paris.
Sauf le respect qu’on doit à sa personne et à ses fonctions, le juge Salzmann semble atteint d’une forme aiguë de la « maladie du soupçon ». D’autant qu’il a affaire, avec Krief, à un dénonciateur jamais à court d’imagination.
L’écrivain Gabriel Matzneff en fait les frais, même s’il ressort libre du cabinet du juge, puisque « Le Monde » le « décharge », peu après de sa chronique. Il y perdra ainsi, par pusillanimité, un collaborateur plein d’humeur et d’humour, denrées assez rares au quotidien de la rue des Italiens.
Le lendemain, le juge Salzmann procède à l’audition de trois jeunes garçons dont les accusations seraient en réalité le point de départ de cette enquête. Tous trois auraient effectué un séjour dans le centre de Claude Sigala.
Le 6 décembre, la chambre d’accusation de la cour d’appel de Paris, présidée par Louis Gondre, confirme l’ordonnance du juge Salzmann qui avait refusé la mise en liberté de Claude Sigala et de Jean-Noël Bardy.
La chambre d’accusation, à nouveau sollicitée pour une demande de mise en liberté de Claude Sigala et des divers inculpés de l’affaire Coral, rendra sa réponse le 17 janvier. Entre-temps, le juge Salzmann inculpe Marie Krief, elle aussi, d’attentat à la pudeur. A la différence de son mari, elle reste en liberté.
Hélas pour la défense, la chambre d’accusation de la cour d’appel de Paris confirme une nouvelle fois les refus des mise en liberté prononcés par le juge Salzmann.
Le 10 février, nouvelles inculpations. Cette fois, il s’agit de violation du secret de l’instruction. En effet, certaines pièces ont été dérobées au dossier et ont été publiées dans la presse, ou lues sur certaines radios libres. C’est l’avocate de Claude Sigala, Me Auerbacher, qui est inculpée par M. Jean Gourlet. Avec elle, Jean Lapeyrie, animateur du « Comité actions prisons justice », inculpé de violation de secret et outrage à magistrat dans l’exercice de ses fonctions.
Encore un fait étrange, ces deux derniers inculpés ont choisi pour avocat, Me Jacques Vergès, qui assurait pourtant au début de cette affaire la défense de Jean-Claude Krief.
Finalement, la chambre d’accusation décidera la remise en liberté de Claude Sigala le 23 février 1983, soit après quatre mois de détention. Cette libération passera tout à fait inaperçue. La première affaire du Coral se termine en eau de boudin. Le juge a des convictions, pas de preuves. Il est établi que certains animateurs du Coral se livraient sur des mineurs à des pratiques homosexuelles ; des « personnalités » étaient au courant —certaines y ont participé. C’est tout.


Des dessous pas propres

Mais entre-temps, l’affaire du Coral s’est complètement transformée. Ce n’est pas tant que les premières inculpations aient été minimisées, loin de là. Mais cette affaire, au cours des différentes enquêtes diligentées par certains de nos confrères, est apparue sous un jour tout à fait différent et pas des plus reluisants. Après la libération de Claude Sigala, on entre dans la deuxième phase de ce scandale à double détente.
Les premières accusations demeurent. Mais une chose est désormais certaine : certains services de police se sont servis de cette histoire pour discréditer certain ministre d’une part et tenter d’obtenir l’interdiction de parution de journaux qui auraient pu être piégés par eux.
Il ne s’agit ni plus ni moins que d’une manipulation policière. Pour bien comprendre ce deuxième aspect de l’affaire du Coral, il convient de remonter dans le temps. Il faut revenir à la courte période qui s’étend du 20 octobre au 20 novembre.
Le 20 octobre, Jean-Claude Krief pénètre dans le commissariat de La Villette. Il y fait une déclaration dans laquelle il accuse les dirigeants du Coral de pratiques contre nature à l’égard des jeunes pensionnaires. Au cours de cette même déposition il dénonce certaines personnalités de second ordre et prétend les avoir vues dans le centre de Claude Sigala. Rappelons qu’à ce moment il est toujours sous le coup d’un contrôle judiciaire ordonné pour falsification de chéquiers. Pourtant il est laissé en complète liberté et désormais, de son aveu même, « fréquente assidûment les services de police ». C’est sans doute cette déclaration qui donnera au juge Salzmann l’occasion d’intervenir.
Alors que l’affaire est dans sa phase initiale Jean-Claude Krief va faire le tour de toutes les rédactions parisiennes avec un document qu’il désire monnayer contre une jolie somme.
Ce document, un procès-verbal établi par des inspecteurs chargés de l’enquête, met en cause un ministre socialiste très en vue... et très voyant. Thuriféraire du président, dont il est le protégé, ce prince aux allures de page est intervenu publiquement, naguère, en faveur des homosexuels, dont il aime à s’entourer. Or, dans le texte qu’exhibe Krief, son nom est cité parmi ceux des habitués du Coral.
Il y aurait là matière à bouleverser le Landerneau politique si, grâce à la vigilance de certains journalistes, la vérité ne tardait pas à apparaître : le document de Krief est un faux.
Plus grave encore : ce faux n’a pu être réalisé que par un policier.
D’ une pierre deux coups

Ecoutons « Minute » qui dans son numéro 1072 révèle sa version du scandale Coral.
« Jean-Claude Krief nous a proposé comme à dix autres confrères un dossier. Nous l’avons étudié avec d’autant plus de sérieux qu’il mettait en cause des personnalités de très haut niveau : un ministre, un attaché de cabinet, des écrivains, des journalistes, des universitaires, des magistrats, etc.
» Nous avons pu vérifier le bien-fondé de certaines accusations mais surtout nous avons pu établir que les « points forts » de ce dossier étaient inventés.
» Krief a commencé par nous réclamer une forte somme d’argent et nous l’avons rapidement éconduit. Or, il est très rapidement revenu et cette fois sans présenter aucune exigence financière. Devant notre scepticisme il a accepté de téléphoner devant nous à la brigade des stupéfiants et du proxénétisme. Il a d’ailleurs accepté d’enregistrer les communications, de se laisser photographier. Bref, il a fait preuve d’un esprit de coopération surprenant.
» Au cours de ces entreriens téléphoniques deux noms ont été prononcés, Ducastel et Riou. Or, comme par hasard, ce sont les deux noms qui figurent sur le procès-verbal.
» On aurait voulu nous convaincre de son authenticité que l’on ne s’y serait pas pris autrement.
» Mais plus significatif encore : alors que nous poursuivions notre enquête nous avons découvert que nos... « confrères » étaient informés de toutes nos démarches. Qu’ils s’attendaient à nous voir publier sans plus attendre le document en question. Qu’ils étaient, en quelque sorte, à l’affût.
» Il était donc parfaitement clair que la même officine policière qui avait monté l’opération, avait alerté certains de ses contacts dans la presse pour que la publication par « Minute » d’accusations d’une extrême gravité et probablement d’une totale fausseté fasse immédiatement l’objet d’une campagne de dénonciation contre notre journal. »
En fait les instigateurs de ce « coup » parvenaient doublement à leur fin. D’une part ils jetaient le doute sur l’honorabilité d’un ministre et d’autre part ils entreprenaient une vaste opération de mainmise sur la presse.
Un faussaire analphabète

Le juge Salzmann a inculpé Jean-Claude Krief, malgré ses déclarations, de vol de document et de fabrication de faux. Or, Krief est incapable d’une telle machination. Sachant à peine lire et écrire c’est un débile léger, véritable jouet entre des mains très expertes.
Les deux opérations des policiers ne fonctionnant pas, il ne restait plus qu’à inculper un pauvre lampiste. C’est essentiellement pourquoi Krief n’a été inculpé dans l’affaire Coral que le... 18 novembre, soit plus d’un mois après le début de l’enquête. Or cette inculpation ne tient pas.
Les policiers connaissaient l’existence du faux procès-verbal de Krief depuis l’inculpation de son frère Michel, le 20 octobre, pour tentative de chantage auprès d’une personnalité politique. Lors de son arrestation dans les locaux d’un ministère, Michel Krief tenait à la main ce faux procès-verbal. Alors, pourquoi avoir attendu près d’un mois pour éclaircir le mystère du procès-verbal volé ?
Il faut se rendre à l’évidence, les policiers qui avaient mis ce faux document entre les mains des frères Krief en attendaient plus. Beaucoup plus.
Quant aux pseudo-aveux de Krief, eux non plus ne signifient pas grand-chose. Et pour plusieurs raisons.
La première est que Krief n’avait aucun besoin de dérober un formulaire puisque lors de ses entretiens dans les locaux de « Minute » avec les policiers du BSP, ces derniers s’étaient engagés à lui fournir toutes les preuves, comme en témoignent les enregistrements détenus par le journal.
D’autre part Jean-Claude Krief ne savait absolument pas ce que contenait ce fameux procès-verbal. En effet, il pensait mettre en cause un simple attaché ministériel alors que c’est d’un ministre dont il s’agissait, et pas des moindres. Comment imaginer que le dénonciateur ait pu confondre un obscur attaché de cabinet et un ministre qui se répand complaisamment dans tous les médias ?
Plus important encore, tous les journalistes qui ont eu l’occasion de rencontrer Krief sont convaincus qu’il était matériellement et intellectuellement hors de sa portée de réaliser un faux aussi vrai. N’écrivant qu’avec des difficultés extrêmes il était tout à fait incapable d’utiliser une machine à écrire.


C’est finalement son frère qui, si l’on peut, en l’occurrence oser cette expression, « croquera le marmot » dans une interview à « Paris-Match » : « Ensuite il y a eu le coup du faux procès-verbal. Que se passe-t-il dans la police ? Je ne sais pas. Je sais en tous cas qu’un flic a remis à mon frère un procès-verbal qui était faux. »

Il ne restera plus aux piégeurs piégés qu’une ultime et dérisoire ressource : insinuer que c’est à « Minute » qu’on a concocté cette piètre provocation. Sans succès. « Menteurs, soyez précis » disait un personnage de Vialatte.







L’AFFAIRE DU CORAL
Comment la police manipule les pédophiles
Claude Sigala, au Coral. Il conservera le même sourire à sa sortie de prison.
Le 6 Mars 1986, la dixième chambre correctionnelle de Paris rendait son jugement dans l’affaire de moeurs du Coral : Claude Sigala, 43 ans, le directeur du Coral, un centre pour enfants inadaptés d’Aymargues (Gard), était condamné, pour attentat à la pudeur sur des mineurs de moins de quinze ans, à trois ans de prison, dont un avec sursis ; Marie Sigala, son épouse, était relaxée, de même qu’un médecin psychiatre, Alain Chiapello, et un ancien éducateur, Yves Renard, mais Jean-Noël Barby, un éducateur de trente ans, Jean-Patrick Lanez, trente et un ans, ancien pensionnaire du Coral, et Gérard Durand, quarante ans, professeur de flûte, étaient condamnés chacun à trois ans de prison dont un avec sursis. Un autre éducateur, Roger Cortes, se voyait infliger une peine de dix-huit mois de prison ferme. Tout ce petit monde faisait appel.
Un an plus tard, presque jour pour jour, la vingt-quatrième chambre de la cour d’appel réduisait sensiblement le verdict : Durand n’était plus condamné qu’à un an de prison, confondu avec une autre peine précédente déjà accomplie ; Bardy, deux ans avec sursis ; Lanez, trois ans avec sursis ; Cortes, deux ans avec sursis ; enfin, Sigala était condamné à trente mois avec sursis, les six mois fermes étant couverts par la détention provisoire ordonnée lors de l’instruction.
Des peines un peu ridicules par rapport à l’émotion et à l’intérêt que l’affaire avait suscités dans l’opinion publique.
C’est cinq ans plus tôt que le scandale avait éclaté, lorsque, le 13 octobre 1982, les gendarmes, agissant dans le cadre d’une commission rogatoire délivrée par un juge d’instruction parisien, Michel Salzmann, avaient pris position autour d’une vieille ferme située à Aimargues, une petite commune du Gard, à quinze kilomètres de Nîmes.
C’est là que Claude Sigala, l’une des figures du mouvement français de l’anti-psychiatrie, animateur du CRA (collectifréseau-alternatif), a créé, aidé par sa femme Marie, dès 1976, un « lieu de vie » baptisé Coral. Le centre a pour vocation d’accueillir et de faciliter la réinsertion de jeunes handicapés mentaux : autistes ou débiles légers.
Amateurs de chair fraîche
On le voit, des principes généreux qui avaient pour but de substituer aux traitements durs des hôpitaux psychiatriques la parole et les méthodes douces de thérapeutes compréhensifs. En théorie, car, en pratique, ces centres attiraient le plus souvent des amateurs de chair fraîche aux arrière-pensées nettement moins philantropiques.
C’est d’ailleurs à partir de plaintes déposées par des parents d’enfants qui sont passés par le Coral que le juge Salzmann a diligenté son enquête. En envoyant les policiers au Coral, le juge espère qu’ils vont lui rapporter des preuves, des photos, des témoignages.
Il ne se trompe pas. Sur place, les enquêteurs mettent au jour des faits troublants. En 1977, un pensionnaire âgé de onze ans avait été découvert mort, la tête dans un seau d’eau. L’autopsie révélait qu’il avait été sodomisé. Un stagiaire avait été soupçonné, mais des experts avaient conclu à son irresponsabilité. Or, quelques jours avant l’arrivée des forces de l’ordre, le pseudo éducateur est revenu au Coral, et des enfants se plaignent de son comportement. Lorsque les gendarmes débarquent, il a à nouveau disparu.
Le dossier semble suffisamment solide au juge Salzmann pour interpeller et inculper Claude Sigala, le directeur du Coral, Alain Chiapello, le médecin psychiatre du centre, et Jean-Noël Bardy, éducateur. Leur mise en détention déclenche immédiatement une campagne médiatique, orchestrée par les habituels intellectuels de gauche, toujours prêts à signer des pétitions. Le juge Salzmann ne se laisse pas décontenancer et, six jours plus tard, prononce trois autres inculpations : Gérard Durand, un professeur de musique exerçant à Paris, Willy Marceau, étudiant, et René Scherer, professeur d’université à Paris VIII.
C’est que le jour même un certain Jean-Claude Krief a été arrêté à son domicile et inculpé par le juge Etienne Guilbaud de « violation des dispositions du contrôle judiciaire ». Ce contrôle lui avait été signifié en Juillet 1982 après une affaire d’escroquerie et de falsification de chèques.
Devant le juge, Jean-Claude Krief fait des aveux explosifs. Il explique au juge que depuis deux ans il a infiltré le plus grand réseau de « Ballets bleus » de France, et qu’il est prêt à aider la justice pour le démanteler. Guilbaud alerte Salzmann qui entend aussitôt Jean-Claude Krief.
Ecoutons Jean-Claude Krief :
Je me nomme Jean-Claude Krief, je suis né le 1er mai 1961 à Argenteuil (95). Fils de parents malades, j’ai été placé dans une institution de la DDASS pendant 13 années, à la suite desquelles j’ai décidé d’émigrer en Israël dans le but de m’y occuper d’enfants. »
Cela se passait en octobre 1980. Je me trouvais dans un kibboutz où je recevais régulièrement des nouvelles de France, par l’intermédiaire du journal Libération auquel je m’étais abonné. »
« C’est donc à cette époque que je lus dans ce journal un article présentant un recueil, celui-ci accompagné d’une photo représentant un gamin collé contre un mur, torse nu, et la braguette déboutonnée. »
Le recueil présenté se nommait Paysages d’enfance, son auteur se prénommait Willy, et l’adresse indiquée au bas de l’article était : 1,3 allée de..., à M... (92). »
« Je pris donc contact avec cette personne par courrier, lui expliquant l’intérêt que j’attachais à ses écrits et lui demandant par ailleurs de m’envoyer un exemplaire de son recueil, moyennant paiement de la somme de cinquante francs. »
« De retour en France, fin octobre 1980, je me remis en contact avec Willy, dans le but de le rencontrer et de savoir qui il était, m’étant douté qu’il était pédophile, chose contre laquelle je combats pour des raisons d’expériences que j’ai subies étant enfant. »
Celui-ci se présenta donc au domicile de ma mère, chez laquelle je demeurais temporairement. Il y découvrit un laboratoire de photos et je lui en montrai le fonctionnement. Etant décidé d’autre part de jouer le jeu du pédophile afin de mieux en savoir quant aux fins qu’il y donnait. »
Clichés pornos
Il vint, quelques jours après, accompagné d’une personne se nommant Gérard et demeurant à Paris 6e.
Gérard me fut présenté par Willy, et ils en vinrent rapidement au but de leur visite :
Gérard me demanda si je voulais bien lui tirer des photos à partir de diapositives. Il me les montra, à l’aide d’une visionneuse, et j’y vis des enfants dans diverses positions pornographiques, dont certaines même avec des adultes dont, bien entendu, D. et M., ceux-ci en train de sodomiser des garçons dont l’âge variait entre 5 et 12 ans.

« Je refusai de tirer celles où il y avait des adultes présents mais j’acceptai néanmoins de tirer une centaine de clichés, ce dans le but d’en conserver un exemplaire à toutes fins utiles.
« L’affaire commençait déjà à m’écoeurer, mais je n’avais pas encore tout vu.
« Fin décembre 1981, j’achetai une revue se nommant Possible. Je la trouvai à la Librairie parallèle, rue des Halles.
« Sur cette revue, il était fait mention d’un manifeste contre l’enfermement des enfants, avec adresse pour tous renseignements : Le Coral, 30470 Aimargues. Tél. : 66.88.00.12.
Claude Sigala.
« Je téléphonai donc à ce numéro, et j’eus pour réponse le conseil d’acheter un livre : Visiblement je vous aime, de Claude Sigala aux éditions Le Coral. Je suivis ce conseil et me remis en contact avec Claude Sigala, afin de lui demander si je pouvais venir faire un stage au Coral en qualité d’éducateur.
« Je m’y rendis donc le 24 décembre 1981, veille de Noël.
« Le Coral est une communauté accueillant des enfants pour la plupart « psychotiques et autistes », placés par diverses D D A A S pour un prix de journée dérisoire.
« Je passai donc les fêtes de fin d’année au Coral et j’y découvris que tout le monde était pédophile, comme l’avait laissé entendre le bouquin de Sigal, et que baiser des gamins n’était pas du tout tabou chez eux.
« Ce que j’y découvris par ailleurs, c’était que bon nombre de personnalités notoires s’y rendaient régulièrement pour y assouvir leurs instincts sexuels, et ce, bien entendu, avec les petits gamins démunis autant de famille que de parole, ne pouvant pas témoigner.
« J’appris, d’autre part, qu’il existait 34 autres communauté de ce style, toutes associations régies par les lois 1901 et regroupées en fédération s’intitulant « Collectif Réseau Alternatif », qui a pour président C. Sigala.
« Ci-joint, la liste des personnes contre lesquelles je viens de témoigner devant les services de la BSP... »
Inculpé pour chantage
A l’appui de ses accusations, Jean-Claude Krief fournit une liste de noms (voir document ci-joint) et un certain nombre de photos. Parmi les noms, celui du fils d’un ancien ministre, d’un journaliste célèbre bien connu pour ses goûts immodérés des très jeunes personnes, d’un écrivain, et, surtout, celui d’un ministre en exercice.
Mais l’affaire se complique gravement lorsque le propre frère de Jean-Claude, Michel Krief, est inculpé pour tentative de chantage à l’égard d’un membre du gouvernement.
Mis en liberté par le juge Salzmann, le 22 Octobre, Jean-Claude Krief fait alors le tour des rédactions avec un document qu’il désire monnayer contre une belle somme.

Selon lui, ce document, qui n’est autre qu’un procès verbal établi par des inspecteurs chargés de l’enquête, met en cause un ministre de Mitterrand qui est souvent intervenu en faveur des homosexuels. Le nom de ce dernier est cité parmi les habitués du Coral.
Or, ce document est un faux. Voilà ce que dit à ce sujet le journaliste de l’hebdomadaire Minute qui a découvert la supercherie :
« Jean-Claude Krief nous a proposé, comme à dix autres confrères, un dossier. Nous l’avons étudié avec d’autant plus de sérieux qu’il mettait en cause des personnalités de très haut niveau : un ministre, un attaché de cabinet, des écrivains, des journalistes, des universitaires, des magistrats, etc.
« Nous avons pu vérifier le bien-fondé de certaines accusations, mais surtout nous avons pu établir que les « points forts » de ce dossier étaient inventés.
« Krief a commencé par nous réclamer une forte somme d’argent et nous l’avons rapidement éconduit. Or, il est très rapidement revenu et, cette fois, sans présenter aucune exigence financière. Devant notre scepticisme, il a accepté de téléphoner devant nous à la brigade des stupéfiants et du proxénétisme. Il a d’ailleurs accepté d’enregistrer les communications, de se laisser photographier. Bref il a fait preuve d’un esprit de coopération surprenant.
« Au cours de ces entretiens téléphoniques, deux noms ont été prononcés, Ducastel et Riou. Or, comme par hasard, ce sont les deux noms qui figurent sur le procès-verbal.
On aurait voulu nous convaincre de son authenticité que l’on ne s’y serait pas pris autrement.
Mais, plus significatif encore : alors que nous poursuivions notre enquête, nous avons découvert que nos « confrères » étaient informés de toutes nos démarches. Qu’ils s’attendaient à nous voir publier sans plus attendre le document en question. Qu’ils étaient en quelque sorte à l’affût.
Il était donc parfaitement clair que la même officine policière qui avait monté l’opération avait alerté certains de ses contacts dans la presse pour que la publication par Minute d’accusations d’une extrême gravité, et probablement d’une totale fausseté, fasse immédiatement l’objet d’une campagne de dénonciation contre notre journal. »
En fait, les instigateurs de cette manipulation, des policiers très spéciaux, seraient parvenus, en cas de succès, à un double résultat : discréditer une certaine presse hostile au pouvoir en place, et semer le doute dans l’esprit des magistrats instructeurs qui ne demandaient qu’à faire honnêtement leur travail.
Concernant Minute, grâce à la vigilance des journalistes de cet hebdomadaire, le coup a raté, mais en ce qui concerne l’enquête judiciaire, il a en partie réussi, puisque, comme on l’a vu au début de cet article, la plupart des inculpés ont bénéficié de non-lieu, et que les peines prononcées ont été dérisoires...


Jean ROBERTO


Bertrand Boulin
dans l’arène du Coral
• Mis en cause au moment du procès par le journal Le Monde, en Janvier 1986, Bertrand Boulin, ancien président de S. O. S.-Enfants, a demandé au quotidien un droit de réponse dont voici de larges extraits :
« J’ai été gravement, et de manière fausse, mis en cause par l’article de Laurent Greilsamer, « Le poids de la pudeur », dans Le Monde du 18 janvier.
« Ce journaliste prétend que, au cours des débats concernant le procès du Coral, on aurait appris que j’aurais « présenté » deux adolescents à un « pédophile notoire », ce qui tend à faire croire d’une part, que j’aurais agi en tant que personne individuelle, et, d’autre part que j’aurais eu connaissance de la « pédophilie » du personnage en question. La formulation est pour le moins malveillante, d’autant plus qu’elle est précédée d’un « au moins deux adolescents » qui fait supposer qu’il y en aurait eu davantage. Or cela n’est pas seulement malveillant, c’est faux.
« Il a été dit au cours des débats que, en tant que président de l’association S. O. S.-Enfants, j’ai placé des enfants au Coral, dont les deux adolescents en question, ce que j’ai confirmé au juge Salzmann quand celui-ci m’a interrogé en tant que témoin.
« Je tiens donc à préciser que, en tant que responsable de l’association S. O. S.-Enfants, j’ai placé des enfants, avec le plein accord, et parfois sur leur demande, des parents, éducateurs, juges et psychiatres, que, pour l’immense majorité de ces enfants, voire tous, ces séjours au Coral ont été bénéfiques, et parfois miraculeux, que j’assume cette responsabilité pleine et entière, et qu’à les voir parler, jouer, rire, aller à l’école, alors qu’ils étaient autrefois enfermés dans des chambres d’hôpitaux psychiatriques ou en passe de l’être, je ne peux que me réjouir. Cela justifie en grande part ma vie.
(...) »
* Cette lettre a été publié par Le Monde le 23 janvier 1986


Il faut dire que, en 1982, nous sommes en pleine euphorie post élection mitterrandienne, et que le pouvoir voit naturellement d'un très mauvais oeil l'implication dans ce scandale de hautes personnalités, d'autant que la plupart des mis en cause affichent des sympathies socialistes. De là à envisager un étouffement volontaire de l'affaire par le pouvoir et ses serviteurs, le pas est d'autant plus vite franchi que des témoignages précis sont apparus sur cette affaire au fil des années:


AVoir : 
Jack Lang Pédophile ?
Frédéric Mitterrand Pédophile ? 
Pédophilie Lexique de A à Z. 
Jean Pierre Rosenczveig Pédophile ? 
Le FLIP (Front de libération des Pédophiles) 
Le Grand Robert de la pédophilie Française. 
Les réseaux pédocriminels. 
Zandvoort - Coral Quand le magistrat français se déculotta pour abuser de Nordine. 
Membres des Réseaux - Le Grand Robert de la pédocriminalité. 

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