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mercredi 13 mars 2013
L'école en Bateau : Menfin le procès 2013
INTERVIEW - Après 18 ans d'errance judiciaire, s'ouvre enfin ce mardi le procès de l'Ecole en bateau. Son fondateur, Léonide Kameneff et trois ex-membres d'équipage comparaissent pour les viols présumés de plusieurs enfants à bord de cette école alternative qui sillonnait les mers dans les années 80 et 90.
Le Karrek Ven a fait rêver de nombreux enfants, il a aussi été le cauchemar de dizaines d'autres. A compter de ce mardi et jusqu'au 22 mars, Léonide Kameneff, fondateur de L'Ecole en bateau, et trois anciens membres d'équipage comparaissent devant les assises des mineurs de Paris pour les viols présumés de plusieurs enfants embarqués à bord de cette école alternative qui sillonnait les mers dans les années 80 et 90. Un procès qui a longtemps fait figure de mirage pour les parties civiles. Plus de 18 ans ont passé depuis la première plainte déposée en 1994 contre cet ancien psychothérapeute pour enfants, à l'origine de l'aventure des voiliers-école. A la veille de l'ouverture du procès, TF1 News a interviewé l'avocat des parties civiles.
La justice n'a pas su prendre dès le départ la mesure de ce dossier
TF1 News : pourquoi a-t-il fallu attendre si longtemps avant la tenue du procès ?
Eric Morain, avocat des 10 victimes : Nous sommes 20 ans après le dépôt de la première plainte. Et on peut dire que le temps est un peu le cinquième accusé de ce procès. Cette lenteur est essentiellement due aux fautes de l'institution judiciaire qui n'a pas su prendre dès le départ la mesure de ce dossier. Il a ainsi fallu attendre que le juge d'instruction en charge du dossier en Martinique soit dessaisi par la plus haute juridiction française et que le dossier soit rapatrié à Paris pour qu'enfin le dossier avance.
Ces lenteurs ont d'ailleurs valu à l'Etat d'être condamné à une indemnisation record et dans des termes très durs par le Tribunal de grande instance de Paris. Ce décalage dans le temps est également dû à Léonide Kameneff qui a utilisé toutes les voies de recours possibles pour éviter ce procès. Et puis, aussi, il a fallu du temps pour certaines victimes pour porter plainte, car il fallait d'abord qu'elles arrivent à se libérer de cette emprise de l'Ecole en bateau.
TF1 News : Les faits sont anciens et parfois prescrits. Au final, combien de victimes seront représentées à ce procès ?
E.M. : Tous les enfants passés sur ce bateau n'ont pas été victimes d'agression sexuelles. Sur les 400 enfants qui ont participé à ces voyages, 180 ont été entendus. Parmi eux, trente à quarante ont dénoncé des faits pouvant tomber sous le coup de la loi. Mais, entre les victimes qui ne voulaient pas s'inscrire dans une longue procédure judiciaire pour pouvoir tourner la page et les problèmes de prescription, on s'est retrouvé avec 14 parties civiles. Sur ces 14 victimes que je défends, on a dû en laisser quatre sur le bord du chemin de la procédure à cause de la prescription. Il en reste donc dix aujourd'hui, ce qui est déjà énorme autant de temps après les faits.
Et puis, il y a une onzième partie civile, qui a une place un peu particulière dans ce procès, car il s'agit d'un jeune homme qui a le double statut de victime et d'accusé. De violé il est passé violeur. A l'époque il était âgé de 17 ans. C'est d'ailleurs pour cette raison que le procès se tient aujourd'hui devant la cour d'Assises des mineurs de Paris.
Les victimes sont sans haine
TF1 News : Qu'attendent les victimes de ce procès ?
E.M. : Ils n'attendent rien d'autre que ce procès se tienne. Elle est là leur victoire : voir Kameneff jugé. Et puis, après avoir été mise sous cloche pendant des années, leur parole va enfin être entendue. Aujourd'hui ce sont des adultes, ils sont parents, ils travaillent, ils ont tous réussi dans la vie. L'un est chef d'entreprise, l'autre magistrat, un troisième journaliste etc... Ils ont entre 30 et 45 ans, ils ne sont plus dans la haine ou dans la vengeance.
TF1 News : Comment cela se passait-il sur le bateau ?
E.M. : c'était une école parallèle, une école alternative issue de la mouvance de mai 68 avec un discours violemment dénigrant contre les institutions et contre les familles des enfants envoyés sur les bateaux. On est à une époque où il n'y a ni téléphone portable, ni internet. Les enfants, parce qu'ils l'ont voulu, sont envoyés à l'autre bout du monde, pendant des mois voire des années. Ils veulent vivre ce rêve. Ils arrivent dans un groupe déjà constitué, avec ses règles. La première chose que vous voulez faire quand vous arrivez là, s'est de vous intégrer donc vous suivez les règles. C'est notamment l'auto détermination, l'autogestion, mais à 10 ans vous n'en n'êtes pas capables donc vous suivez l'exemple du capitaine et vous essayez d'être le favori.
Ca se passait naturellement, malgré toute l'horreur des faits
TF1 News : Il régnait semble-t-il un climat "libertin" sur le Karrek Ven
E.M. : Pour Kameneff, il n'y avait pas de différence entre adulte et enfant, il y a avait juste des humains qui avaient le droit de s'aimer. La nudité était prônée. Rien n'était imposé. C'était beaucoup plus subtil que cela. Mais l'emprise mentale rendait l'enfant sans défense. Les faits se déroulaient essentiellement dans le carré du bateau ou dans les couchettes des adultes, parfois à côté d'autres enfants. Ca se passait sans cri, sans pleurs. Ca se passait naturellement, malgré toute l'horreur des choses. Et c'est ce "naturellement" qui créé le crime car ces enfants avaient moins de 15 ans et qu'en dessous de 15 ans on ne se pose pas la question du consentement. C'est interdit par la loi et ça doit être condamné. Point.
TF1 News : Léonide kameneff, le principal accusé, nie les faits. Les audiences s'annoncent difficiles...
E.M. : On annonce en effet que Kameneff va à nouveau revenir sur ses aveux. Je rappelle qu'il a fait des aveux en 1995, particulièrement circonstanciés et répétés. Il a bénéficié d'un non-lieu pour des questions de procédure. Il a fait de nouveaux aveux en 2009, mais il dit aujourd'hui que c'était uniquement pour sortir de sa détention provisoire. Si c'est le cas, cela montre à quel point le personnage est malin.
Mais là, il va falloir qu'il soit face à toutes les victimes, qu'il entende leurs témoignages, y compris ceux des enfants pour qui les faits sont prescrits mais qui viendront quand même témoigner. Il sera difficile pour lui, je pense, de continuer de dire que toutes les parties civiles sont des enfants qui ont un mal être et qu'ils ont trouvé pour médicament de dénoncer les faits qui lui sont reprochés, alors que cela ne leur apporte rien d'autre qu'une dépense d'énergie et un quotidien difficile à gérer pour mener à bien cette procédure.
AVoir:
Ecole en bateau : Ma jeunesse violé.
Leonide Guy Kameneff Pédophile "Léo".
Le Grand Robert de la pédophilie Française.
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